Promotion et rayonnement de la langue française.

Maintenir la qualité de notre langue, sans laxisme ni purisme.

Quand le français fait son cinéma !

La richesse de la langue française se retrouve dans son prestige culturel, dans sa notoriété internationale, dans sa littérature exceptionnelle, et dans d’autres modes d’expression, considérés, sans doute à tort, comme mineurs, mais bien vivants, le cinéma, la bande dessinée, le théâtre de boulevard, le roman d’aventures et la chanson. 
Le cinéma est né simultanément dans les années 1890 aux États-Unis avec Thomas Edison et en France les frères Lumière (avec, reconnaissons-le, une petite avance à Edison). Le cinéma français va se distinguer, entre autres, par des chefs-d’œuvre dans lesquels la richesse et la beauté des dialogues prendront une place prépondé- rante. Il s’appuie sur une tradition particulière où le merveilleux des images est rehaussé par des dialogues de grande qualité donnant ainsi toute sa dimension à l’expression de cinéma parlant

Depuis La Grande Illusion (Jean Renoir, 1937), Quai des Brumes (Marcel Carné, 1938), ou Hôtel du Nord (Marcel Carné, 1938), des répliques culte sont restées comme gravées dans nos mémoires : « T’as d’beaux yeux, tu sais » (Jean Gabin à Michèle Morgan, Quai des Brumes) ; « Atmosphère, atmosphère, est-ce que j’ai une gueule d’atmosphère ? » (Arletty à Louis Jouvet, Hôtel du Nord). Ou encore, « C’est tellement simple, l’amour » que déclare Arletty à Jean-Louis Barrault dans Les Enfants du paradis (1945), avec dialogues de Jacques Prévert, élu en 1995 « meilleur film de tous les temps » par les critiques de cinéma et inscrit au patrimoine mondial de l’humanité de l’Unesco. 
Le cinéma Nouvelle Vague révolutionne le regard de la caméra d’après-guerre... avec toujours le sens de la formule. « Montez dans votre Alfa, Roméo ! On verra après ! » lance Brigitte Bardot à Jack Palance, dans Le Mépris de Jean-Luc Godard, en 1969. 
Et encore :
«
Est-ce qu’il y a des trompettes dans votre roman ? – Ah, non. – Et des tambours ? – Non. – Eh bien, vous n’avez qu’à l’appeler “Sans tambours ni trompettes”. » (Domicile conjugal, François Truffaut, 1969.) 
Quant au cinéma populaire, dont les scénarios semblent n’être parfois que le prétexte à des dialogues percutants, il reste une des marques de fabrique des films français. Florilège : 
« Les cons, ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît » (Lino Ventura à Francis Blanche, Les Tontons flingueurs, Georges Lautner, 1963). 
Jean Gabin : « En admettant qu’on soit cinq sur l’affaire, ça rapporterait combien à chacun ? – Vingt ans de placard ! Les bénéfices, ça se divise, la réclusion, ça s’additionne. » (Le Pacha, Georges Lautner, 1968.) 
Et pourquoi pas une double réplique de Bourvil et de Funès, dans La Grande Vadrouille, de Gérard Oury (1965) : « Y a pas d’hélice, hélas !
– C’est là qu’est l’os !
» ou, pour notre plaisir : « Ils peuvent me tuer, je ne parlerai pas ! – Mais moi non plus, ils peuvent vous tuer, je ne parlerai pas ! – Je savais que je pouvais compter sur vous ! » (Bourvil et de Funès) 
Les titres de certains films (en particulier dus à Michel Audiard), démesurément longs ou allusifs, renvoient à cette conception savoureusement décalée du cinéma : Faut pas prendre les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages (Lautner, 1968) ; Elle boit pas, elle fume pas, elle drague pas, mais... elle cause (Lautner, 1970) ; Le Grand Blond avec une chaussure noire (Yves Robert, 1972) ; Un éléphant, ça trompe énormément (Yves Robert, 1976) ; Le père Noël est une ordure (Jean-Marie Poiré, 1980); La vie est un long fleuve tranquille (Étienne Chatilliez, 1988). 

Encore aujourd’hui, le cinéma français réussit à faire vivre un cinéma d’auteurs où les dialogues et la langue s’en donnent à cœur joie ! 

Alain Sulmon 
Délégation du Gard